• Animorphs - T13 - La mutation - Chapitre 5

      < Un Hork-Bajir! > a répété Rachel avec stupéfaction.

      Il y a un an, ce nom n'aurait eu aucune signification pour moi. Ce n'aurait été qu'un mot absurde.

      Maintenant, je connaissais les Hork-Bajirs. L'Andalite qui nous avait donné nos pouvoirs nous avait dit qu'ils étaient jadis une espèce pacifique, honnête. Mais ils avaient étés asservis par les Yirks. Désormais, ils étaient tous Contrôleurs. L'espèce tout entière avait une limace yirk dans la tête.

      Et sous l'emprise des Yirks qui contrôlaient leur moindre geste, les Hork-Bajirs étaient devenus des machines à tuer ambulantes.

      Etonnament rapides. Incroyablement forts. Protégés par leur carapace, hérissés de lames, quasiment sans peur. Les troupes de choc des Yirks.

      A plusieurs reprises, Rachel avait failli se faire tuer par ces créatures. Et tous, nous avions senti la caresse de leurs lames au moins une fois.

      < Comment se fait-il qu'un Hork-Bajir se montre en plein jour? > m'a-t-elle demandé.

      J'ai regardé plus atentivement. Il grimpait sur une sorte d'échelle. Arrivé à la surface, il a cligné ses yeux de reptile, ébloui par la lumière. Puis il est sorti et il est resté planté là, comme une vraie vision d'horreur. Alors, j'ai remarqué qu'un deuxième Hork-Bajir le suivait.

      < Il y en a deux! > a crié Rachel.

      < Ouais. Et tu sais quoi? J'ai l'impression qu'ils ont peur. >

      A ce moment-là...

      Skriiiiiiit! Skriiiiiiit! Skriiiiiiit!

      Pour mes oreilles de faucun, le bruit de cette alarme était assourdissant. Comme un hurlement qui jaillissait du trou dans le sol. Les deux Hork-Bajirs sursautèrent de surprise et de peur. L'un d'eux attrapa l'autre par le bras et le serra l'espace d'une fraction de seconde. L'instant d'après, ils couraient à travers les bois.

      Ils couraient comme si leur vie en dépendait.

      Et je vais vous dire une chose : les Hork-Bajirs peuvent foncer quand ils le veulent. Ces grandes jambes longues font de grandes, longues enjambées. Ils se sont enfoncés dans les broussailles en donnant de violents coups avec leurs bras armés de lames, fauchant les ronces et les arbustes comme des épis de blé.

      < Où en es-tu de ton temps d'animorphe? > ai-je demandé à Rachel.

      < Il me reste encore au moins une heure. >

      < Alors on les suit? >

      < D'accord. >

      Nous avons battu des ailes pour reprendre un peu d'altitude et nous nous sommes préparés à suivre les fuyards. Ce n'était pas vraiment mission impossible : le chemin qu'ils se taillaient dans la forêt était une ligne droite. Même un aveugle aurait pu le suivre. 

      < Ils ne sont pas vraiment discrets, hein? > a commenté Rachel.

      Et c'est alors que les choses se sont carrément compliquées. Du trou dans le sol a déferlé un flot d'humains. Ils étaient armés. Des hommes et des femmes, habillés de toutes sortes de vêtements d'humains normaux.

      Des Contrôleurs, bien sûr, même si cela ne se voyait pas de prime d'abord. Maintenant, je savais que ce trou conduisait au Bassin yirk. Et il n'y avait pas l'ombre d'un doute dans mon esprit : ces humains étaient des humains-Contrôleurs sous le pouvoir des Yirks qui vivaient dans leurs têtes.

      Ils étaient équipés d'armes humaines : des fusils, parmi lesquels des automatiques, et des pistolets.

      Les Yirks poursuivaient les deux Hork-Bajirs, mais ils étaient prudents. Ils n'envoyaient que les humains-Contrôleurs. Ils ne voulaient pas augmenter le risque que des Hork-Bajirs soient vus par des gens normaux.

      Vingt... trente humains-Contrôleurs sont sortis du trou.

      < Ils ne les rattraperont jamais >, a dit Rachel.

      < Je sais. Qu'est-ce qui se passe, à ton avis? Tu crois que ces Hork-Bajirs essaient de s'enfuir ou quoi? >

      Des machines sont alors apparues à la surface du trou. On aurait cru qu'elles lévitaient. J'ai failli rire en les reconnaissant.

      < Des motos tout-terrain? Les Yirks ont des motos? > 

      Ca me paraissait bizarre, et même drôle. Les Yirks ont des vaisseaux spatiaux qui dépassent la vitesse de la lumière. Et maintenant, ils se servaient de motos tout-terrain?

      < Hum, hum... a fait Rachel, les Hork-Bajirs sont rapides, mais quand même pas à ce point. >

      Vrrrroum! Vrrrroum! Vrrrroum!

      Les humains-Contrôleurs faisaient démarrer leurs engins. J'entendais le rugissement des moteurs. En tout, quinze Yamaha et Kawasaki étaient sorties de ce trou.

      Elles sont parties à fond. Certaines avec un seul humain, d'autres avec deux : l'un pour conduire, l'autre pour tirer.

      Les Hork-Bajirs avaient quelques centaines de mètres d'avance, mais ils ne parviendraient jamais à semer ce petit escadron.

      Depuis ma position bien à l'abri dans le ciel, je regardais les motos s'enfoncer en vrombissant dans la forêt, à la poursuite des Hork-Bajirs. Elles soulevaient la terre et les feuilles mortes et rompaient le calme.

      Et elles gagnaient rapidement du terrain sur les deux fuyards. Blam! Blam! Blam! Blam!

      Les fusils automatiques aboyaient, les motos rugissaient! Les Hork-Bajirs couraient toujours, mais les motos zigzaguaient, bondissaient, volaient vers eux.

      Blam! Blam! Blam! Blam!

      Bambambambambambambambambambambambambambam!

      Les revolvers et les armes automatiques lacéraient les troncs d'arbre. Les humains-Contrôleurs tiraient sans retenue. Sur tout ce qui bougeait. Ils ne pouvaient pas encore voir  nettement les Hork-Bajirs, mais ils les apercevaient par intermittence et continuaient de faire feu.

      < Dans dix secondes, ce sera fini, a dit Rachel avec amertume. Qu'est-ce qu'on fait? >

      J'en suis resté sidéré.

      < Tu veux aider des Hork-Bajirs? >

      < Tu as jamais entendu le dicton : "L'ennemi de mon ennemi est mon ami"? Les Yirks veulent tuer ces deux Hork-Bajirs. Ca me suffit. >

      < A moi aussi, ai-je répondu. Nous allons devoir utiliser la parole mentale et nous adresser directement à eux. >

      < Allons-y >, a lancé Rachel.

      J'aurais souri si j'avais eu une bouche. Rachel est tellement courageuse qu'elle frise la témérité.

      C'est quelque chose que j'aime bien chez elle.

      < Hé! Les Hork-Bajirs, en bas! >

      Je les ai vus tituber, comme s'ils étaient surpris et choqués d'entendre une voix mentale. Comme si c'était ça le problème.

      < Vous n'avez pas de grandes chances de vous en sortir, ai-je ajouté. Ecoutez-moi, et peut-être que vous pourrez vous en tirer vivant. >


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